L'Observatoire de l'Abitibi-Témiscamingue

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Changements climatiques et maîtrise de l'énergie , Transport

Tendances du parc automobile

— Mariella Collini

Dans le contexte de la lutte aux changements climatiques, l’atteinte des cibles gouvernementales en matière de réduction d’émissions de gaz à effet de serre (GES) et de l’utilisation de produits pétroliers commande une compréhension de la consommation énergétique du secteur des transports. La Chaire de gestion du secteur de l’énergie vient de rendre public un état des lieux sur l’évolution du parc de véhicules légers au Québec de 2013 à 2021.




Le rapport sur la caractérisation du parc automobile québécois et de la performance énergétique pour la période 2013-2021 s’inscrit dans la même veine que ceux réalisés pour les périodes 2003-2008 et 2009-2012. Le rapport approfondit plus spécifiquement les tendances au sein du parc de véhicules légers, comprenant les automobiles et les camions légers de types véhicules utilitaires sport (VUS), camionnettes et fourgonnettes. Cette segmentation du parc automobile s’inscrit dans le contexte québécois où 43 % des GES proviennent du secteur des transports (routier, aérien, etc.), ce qui correspond à 33 millions de tonnes de GES, dont 73 % proviennent du transport routier et plus de la moitié (52 %), spécifiquement des voitures et des camions légers.

L’utilité de comprendre l’évolution de la consommation énergétique et des tendances du parc automobile s’inscrit dans l’atteinte de cibles gouvernementales (réduction d’émissions de GES, utilisation de produits pétroliers), mais permet également de planifier des actions pouvant s’inscrire dans d’autres domaines d’intérêt (utilisation des ressources naturelles nécessaires à la transition énergétique, sécurité routière, congestion et productivité, santé publique ou finances personnelles).

PARC AUTOMOBILE SOUS ANALYSE
Les véhicules légers inclus dans l’analyse peuvent être utilisés à des fins personnelles ou commerciales/institutionnelles. Tous les types de motorisation (essence, diesel, entièrement électrique, hybride branchable et hybride) sont pris en considération. Selon les critères établis1, certains véhicules sont exclus en raison de leur masse, leur usage hors du réseau routier, etc.

TENDANCES RÉGIONALES
En 2021, 92 071 véhicules légers étaient immatriculés en Abitibi-Témiscamingue, ce qui représente une croissance de 0,8 % par rapport à 2013 (+6,5 % au Québec). Ce parc se composait de 83 354 véhicules destinés à un usage personnel (+0,3 %) et de 8 717 véhicules utilisés à des fins commerciales et institutionnelles (+6,6 %). À l’exception de la Côte-Nord, qui affiche une diminution du nombre de véhicules légers, l’Abitibi-Témiscamingue est où le parc a augmenté le moins rapidement parmi toutes les régions du Québec. Néanmoins, la croissance des véhicules légers est supérieure à la croissance anémique (0 %) de la population en âge de conduire (16 ans et plus)2.

Au prorata de la population, on dénombre 621 automobiles et camions légers pour 1 000 habitants de la région en 2021, ce qui est un ratio supérieur à celui du Québec (548). L’Abitibi-Témiscamingue se classe au 6e rang parmi les régions à posséder le plus de véhicules légers, suivant la Gaspésie–Îles-de-la-Madeleine (671), Chaudière-Appalaches (634), les Laurentides (627), le Centre-du-Québec (623) et le Bas-Saint-Laurent (622).

En Abitibi-Témiscamingue, le parc de véhicules légers se distingue par un nombre de camions légers (58 700) supérieur au nombre d’automobiles (33 371). À l’image de l’ensemble du Québec, les VUS occupent désormais la première place sur le réseau routier régional. Avec une hausse de 84 % des unités en circulation depuis 2013, les VUS représentent plus du tiers du parc de véhicules légers. Si on ajoute les camionnettes et les fourgonnettes, la proportion grimpe à 60 % dans la région, comparativement à 49 % à l’échelle québécoise. La croissance importante des VUS s’est faite au détriment des voitures de toutes tailles, mais particulièrement des voitures compactes et sous-compactes, avec des diminutions respectives de 39 % (-8 000) et 54 % (-3 100). Seules les voitures de classe intermédiaire ont légèrement gagné en popularité, étant un peu plus nombreuses en 2021 que 8 ans plus tôt.

Nombre et proportion de véhicules légers selon la classe
> Abitibi-Témiscamingue et ensemble du Québec, 2013 et 2021

Classe2

Abitibi-Témiscamingue

Ensemble du Québec

2013

%

2021

%

Variation
2013-2021

2013 - %

2021 - %

Deux places

401

0,4

324

0,4

-19 %

0,6

0,4

Sous-compacte

5 710

6,3

2 607

2,8

-54 %

8,8

4,5

Compacte

20 336

22,3

12 372

13,4

-39 %

30,9

20,6

Intermédiaire

12 203

13,4

12 616

13,7

+ 3 %

14,5

17,7

Grande berline

3 018

3,3

1 877

2,0

-38 %

2,3

1,9

Familiale

4 014

4,4

3 575

3,9

-11 %

5,5

5,6

Camionnette

19 667

21,5

21 151

23,0

+7,5 %

8,6

9,3

VUS

18 002

19,7

33 168

36,0

+84 %

20,4

35,0

Fourgonnette

7 971

8,7

4 381

4,8

-45 %

8,4

5,0

Total

91 322

100,0

92 071

100,0

0,8 %

100,0

100,0

Sources : Pineau, P.-O., Vincent, B., Tendances du parc automobile québécois 2013-2021, Chaire de gestion du secteur de l’énergie, HEC Montréal, 2023 et données obtenues sur demande pour la région.


Avec l’ajout d’un nombre grandissant de VUS et d’une proportion importante de camionnettes, le parc de véhicules légers immatriculés dans la région est plus lourd que celui des années antérieures. En proportion, 47 % du parc automobile de la région contient des véhicules d’une masse de 1 700 à 3 850 kg, alors qu’il s’agissait de 42 % en 2013. Au Québec, cette proportion est passée de 25 % à 29,5 % (de 27 % à 40 % pour les véhicules neufs). Avec une augmentation de 5 % en 9 ans, la masse nette moyenne des véhicules légers, estimée à 1 736 kg, est supérieure à la masse moyenne des véhicules du Québec (1 581 kg). Si la masse nette marque une croissance plus rapide pour les véhicules légers à usage personnel (5,5 %) que ceux à usage commercial (2,1 %), il reste que les véhicules légers à usage commercial sont plus lourds (2 027 kg) que les véhicules personnels (1 706 kg) dans la région. De manière générale, la masse nette moyenne des véhicules légers positionne l’Abitibi-Témiscamingue au 2e rang provincial, et ce, tant pour les véhicules personnels que commerciaux, suivant le Nord-du-Québec.

À l’image de la tendance québécoise, le parc automobile de la région ne cesse de vieillir au fil des années. Alors que l’âge moyen de tous les véhicules légers en circulation était de 7,5 ans en 2013, il atteignait 8,4 ans en 2021 en Abitibi-Témiscamingue. Le vieillissement du parc s’est accéléré durant les années 2020 et 2021, alors que l’on a observé une diminution du nombre de véhicules neufs immatriculés. Avec la hausse du prix des véhicules (neufs et d’occasion) combinée aux taux d’intérêt élevés, la conjoncture récente du marché ne plaide pas pour une inversion de cette tendance, selon les auteurs du rapport. Ce constat pourrait avoir pour conséquence de ralentir le renouvellement du parc automobile vers l’électrification et, par ricochet, la réduction de la consommation de produits pétroliers.

Taux moyen de consommation (TC) et taux d’émission de GES (TE)
Il est important de préciser que le rapport se penche uniquement sur la consommation d’énergie par 100 km (TC) et les émissions de GES par km (TE), et ce, à partir de données théoriques fournies par les différents manufacturiers de véhicules. En d’autres mots, il ne calcule pas la consommation en énergie et les émissions de GES totales du parc automobile. L’une comme l’autre des dimensions dépendent du type et des conditions de conduite de chaque véhicule ainsi que du nombre de véhicules et du kilométrage annuel parcouru.

À l’instar des régions du Québec, le taux de consommation (TC) moyen en Abitibi-Témiscamingue tend à diminuer du fait des gains d’efficacité techniques des véhicules neufs, toutes classes confondues. Néanmoins, le rapport statue que l’amélioration du TC moyen est atténuée en raison du nombre de VUS et de camions neufs en circulation, eux qui détiennent les TC moyens les plus élevés. Dans la région, le TC moyen combiné (ville et route) des véhicules légers a diminué de 9 % entre 2013 et 2021, pour atteindre 10,4 l/100 km (-10 % au Québec). Non seulement ce taux est-il supérieur à celui de l’ensemble du Québec (9,4 l/100 km), mais il positionne l’Abitibi-Témiscamingue au 2e rang des régions à détenir les plus hauts taux de consommation moyens. Trois autres régions périphériques – Côte-Nord, Saguenay-Lac-Saint-Jean et Nord-du-Québec – se rangent parmi les régions où le parc de véhicules légers est plus énergivore. Ce constat n’est pas étranger à la configuration du parc automobile régional ainsi qu’à l’âge moyen.

Comme ailleurs, on observe une amélioration du taux d’émissions (TE) de GES moyen, avec une diminution progressive, passant de 273,7 à 245,0 grammes de CO2e/km entre 2013 et 2021, soit une diminution de 10 % dans la région (-11 % au Québec). L’Abitibi-Témiscamingue se positionne au 2e rang des régions à détenir les plus hauts taux d’émission de GES moyens, suivant le Nord-du-Québec. La diminution du TE de GES moyen pour les véhicules neufs est aussi moins importante pour le parc de véhicules légers de la région (-6 %) que pour celui du Québec (-10 %), en raison du type de véhicules plus lourds priorisé par les propriétaires de l’Abitibi-Témiscamingue.

Taux de consommation moyen1 et taux d’émission de GES, tous les véhicules et véhicules neufs
> Abitibi-Témiscamingue et ensemble du Québec, 2013 et 2021

 

TC moyen1

Taux d’émission de GES

Tous

Neufs

Tous

Neufs

2013

2021

2013

2021

2013

2021

2013

2021

Abitibi-Témiscamingue

11,5

10,4

10,4

9,7

273,7

245,0

241,0

224,7

Ensemble du Québec

10,5

9,4

9,5

8,7

248,7

220,5

221,3

199,6

Note : 1. Les TC rapportés sont des taux de consommation équivalents en énergie. La consommation des véhicules entièrement électriques et hybrides branchables est exprimée en équivalent de litres d’essence, et ces valeurs contribuent à faire diminuer les TC, en plus des gains d’efficacité des moteurs des voitures conventionnels. Un litre d’essence contient l’énergie équivalant à 8,9 kWh d’électricité.

Sources : Pineau, P.-O., Vincent, B., Tendances du parc automobile québécois 2013-2021 et Caractérisation énergétique et des émissions de gaz à effet de serre (GES) du parc de véhicules légers immatriculés au Québec pour les années 2013 à 2021, Chaire de gestion du secteur de l’énergie, HEC Montréal, 2023.

Électrification
En 2021, 1 436 véhicules hybrides branchables (VHB) et entièrement électriques (VEÉ) circulaient sur les routes de la région, représentant 1,6 % des véhicules légers de la région (2,6 % au Québec). L’Abitibi-Témiscamingue arrive au 13e rang parmi les régions au Québec au regard du ratio par 1 000 habitants détenant un VHB et VEÉ (10 c. 15 au Québec). L’âge moyen des propriétaires de VHB et VEÉ dans la région (49 ans) est un peu plus bas que celui des propriétaires québécois (50 ans). La masse nette moyenne de ces véhicules (1 718 kg) est en croissance, bien que moins prononcée (1,7 %) que celle qui prévaut au Québec (4,7 %; 1 706 kg). À l’échelle du Québec, un peu à l’image des véhicules de motorisation conventionnelle, les VHB et les VEÉ les plus populaires sont de types VUS et de classe intermédiaire. Dans la région, une diminution de la consommation énergétique (-15 %) des VEÉ est observée par rapport à 2013, pour atteindre un TC moyen de 2,0 l/100 km en 2021 (voir note 1 sous le tableau). La progression de l’autonomie des batteries serait l’explication, celle-ci étant passée, en moyenne, de 113 km à 301 km au cours de la période analysée. Inversement, les données indiquent une diminution de l’autonomie pour les VHB, ce qui expliquerait la légère augmentation du TC moyen (+4 %; 4,2 l/100 km) pour la même période.

Notes : 
1. Les véhicules ciblés pour les analyses sont limités aux véhicules légers (automobiles et camions légers), à l’exception des véhicules :
• dont la classe correspond à une minicompacte, un fourgon ou un véhicule à usage spécial;
• dont la masse nette excède 3 850 kg;
• non autorisés à circuler sur le réseau routier (véhicules hors route, etc.);
• dont le type d’utilisation ne correspond pas à l’usage généralement attribué aux V.L.;
• âgés de plus de 15 ans;
2. La croissance de la population a été calculée par l’Observatoire, à partir des estimations de la population produites par l’Institut de la statistique du Québec (ISQ).



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